Mise en pratique : comment adopter une démarche data-driven en lien avec le RNE
Passons maintenant aux conseils et retours d’expérience pour engager efficacement une démarche data-driven qui s’inscrit dans le cadre juridique adéquat. L’idée ici est de vous livrer des pistes concrètes, issues de projets menés auprès de PME françaises sur ces problématiques. De plus en plus d’entreprises se sensibilisent à la data, mais elles oublient parfois de prendre en compte l’intégralité des volets législatifs et administratifs.
1) Identifier les sources de données pertinentes
Le premier réflexe consiste à dresser un inventaire exhaustif des données que vous manipulez, en distinguant :
Les données internes (informations comptables, retours clients, statistiques de vente, données RH, etc.).
Les données externes (RNE, open data sectorielle, bases de partenaires, fichiers de prospection, etc.).
Cette étape permet souvent de classifier la sensibilité et la finalité de chaque source. Par exemple, le RNE est exploitable principalement pour vérifier la validité ou l’authenticité d’une entreprise. Il ne doit pas dériver en un usage marketing abusif, sans finalité légitime.
En parallèle, identifiez qui, au sein de votre structure, aura la légitimité et la compétence pour manipuler ces informations. Une utilisation débridée des données, sans la mise en œuvre d’un processus de gouvernance, conduit inévitablement à des dérives. Ainsi, on veille à désigner un Responsable du traitement qui sera en mesure de justifier les opérations menées et la fiabilité de ces data.
2) Mettre en place une architecture technique adaptée
Une stratégie data-driven s'appuie le plus souvent sur des infrastructures solides : serveurs sécurisés, bases de données performantes, ou plateformes Cloud offrant des garanties de redondance et de confidentialité. Toutes les informations que vous manipulez, y compris celles issues du RNE, doivent être hébergées et traitées selon des protocoles de sécurité éprouvés : chiffrement, gestion fine des droits d’accès, logs de connexion, etc. Selon un sondage récent, 80 % des PME victimes d’une fuite de données rencontrent des difficultés de confiance auprès de leurs partenaires dans les mois qui suivent. Il est donc impératif d’anticiper les mécanismes de protection et de traçabilité.
Sur le plan opérationnel, vous pouvez recourir à un CRM ou à un ERP interfacé avec le RNE si vous devez régulièrement mettre à jour les fiches d’entreprises. Chaque synchronisation implique cependant des contrôles de cohérence. Je recommande généralement à mes clients de créer des alertes automatiques en cas de divergence entre la fiche interne et la fiche officielle (ex. changement d’adresse, modification de la forme juridique, cessation d’activité). Les informations puisées dans le RNE restent des données sensibles ; prévoyez donc un cryptage ou des mesures de protection contre l’accès non autorisé.
3) Définir des règles de gouvernance claires
Un projet data-driven implique souvent plusieurs métiers (marketing, finance, production) et génère de la data à différents stades. Vous devez donc fixer des règles claires pour éviter que chacun n’exploite ces informations en toute autonomie, au risque de multiplier les mauvaises pratiques. Ces règles concernent :
La finalité du traitement (par exemple : validité des fournisseurs, analyse de risques, profilage juridique).
Les destinataires autorisés (qui a le droit de consulter, de modifier, d’exporter les données ?).
La durée de conservation (à différencier en fonction du type de données).
La rectification et la mise à jour (comment prendre en compte une évolution, un changement de dénomination sociale ?).
Lorsque j’interviens dans l’accompagnement de PME, je conseille souvent de rédiger une charte interne dédiée aux usages data. Ce document, qui peut être validé par un juriste, clarifie la démarche et rappelle le rôle de chacun. C’est particulièrement pertinent dans un contexte où le RNE est mobilisé sur une base régulière, car il s’agit d’un référentiel légal susceptible d'engager la responsabilité de l’entreprise si des usages litigieux sont détectés.
4) Formaliser la conformité avec la CNIL et le RGPD
Au-delà du cadre national, le RGPD vient apporter des spécificités et des obligations dans votre stratégie data-driven. En pratique, vous devez
Obtenir le consentement éclairé pour toute collecte de données personnelles destinée à un traitement secondaire ou marketing.
Permettre l’exercice des droits (droit d’accès, de rectification, d’effacement, etc.).
Tenir un registre de traitements en lien avec les applications, bases et logiciels que vous utilisez.
Si votre recours au RNE fait partie de ces traitements, vous devez décrire précisément dans ce registre à quel moment vous consultez ce registre national, pour quelles raisons et comment vous assurez la sécurité des données extraites. Cette formalisation est parfois perçue comme contraignante, mais elle vous protège de tout litige ultérieur et démontre un engagement envers la protection des données. La CNIL propose régulièrement des mises à jour et des outils pédagogiques pour guider les entreprises. C’est un excellent point de départ si vous n’êtes pas certain de la légitimité ou de la portée de vos traitements.
5) Exploiter de manière éthique les données
L’éthique doit être au cœur de la transformation data-driven. Collecter et croiser un maximum d’informations est devenu techniquement plus facile, mais vous devez constamment avoir en tête la finalité réelle et légitime de vos traitements. Par exemple, si votre objectif est d’analyser le comportement d’achat d’entreprises clientes, assurez-vous que ces données soient obtenues en toute transparence et que vous n’outrepassez pas un usage purement administratif du RNE. En cas d’audit, vous devrez prouver votre diligence et justifier que vous ne détournez pas la finalité initiale des informations recueillies.
Dans le même esprit, la notion de privacy by design (conception centrée sur la protection de la vie privée) propose d’intégrer les règles de protection des données dès le début du projet. Cela se traduit par des paramétrages de confidentialité par défaut, un accès restreint selon les besoins, et des notifications claires sur les usages. Le respect de la vie privée et des législations n’est pas un simple argument marketing : c’est un véritable gage de sérieux et de durabilité pour votre stratégie numérique.